jeudi 1 mars 2012

Ultime échappée




ULTIME ECHAPPEE

Oiseau, tu nous as quittés, comme ça.
Un matin, tel le cygne qui prend son envol.
Vers la lumière.
Là-bas.
Dans un pays sans nom.
Que tout le monde connaît !
Que tout le monde tait !
C’était la fin de ta Voie.

Un jour tu naquis, les yeux vers le soleil de la vie.
Tu vibrais telle la goutte d’eau dans l’océan de l’existence.
A la quête de la Sagesse dont tu mendiais, jusqu’au vertige,
Les parfums enivrants pour remplir la coupe de ton espérance.
A la source de la terre des mille forteresses.
C’était l’aurore de ta Voie.

Appelé par un indicible essor.
Tu passas les forts et les frontières !
Et tu cherchais, aux rivages lointains, la lumière cachée...
Rien ne t’arrêta, dans ta quête de la Vérité, au-delà de l’humain !
Par delà les combats, tel le Preux Chevalier !
Tu sus être l’Autre que Noble Dame cherchait.
C’était ta Voie.


Tu marchais devant toi, malgré les vents contraires.
Et ton gouvernail mettait le cap, là bas.
Où est l’ivresse, O terre des forteresses ?
Il te faut des cœurs purs, lavés au sel des larmes.
Abreuvés de Sagesse à ta voix éternelle.
Tu veux nous entraîner au maniement des armes,
Et le trophée attend le vainqueur en ton ciel.
C’est la Voie.


La souffrance a moulu ta vie... Ta coupe est en éclats.
Mais ton esprit fait germer, dans les cœurs en détresse,
Une vie plus ardente... et ta présence est là.
Tu nous as devancés au Pays sans nom.
Que tout le monde connaît.
Que tout le monde tait.
C’est notre Voie.


Ce n’est qu’un au revoir, Oiseau.

L'aigle et la cage



L'AIGLE ET LA CAGE

"Celui qui s'efforce d'atteindre son bonheur personnel, en maltraitant ou en faisant périr des êtres qui, eux aussi, tendaient vers le bonheur, ne trouvera pas ce dernier".

DHAMMAPADAH

Sur le pic, le plus élevé de la montagne, se trouvait la plus gentille famille d'aiglons que les temps avaient connue. Dans le nid, un couple d'aigles royaux avait mis au monde trois petits qui croissaient en force et vigueur. Rien n'aurait troublé une vie aussi tranquille si, par malheur, un homme avide de sensations fortes n'avait eu la malencontreuse idée d'aller voir de plus prés, par bravade, à quoi pouvaient penser de tendres aiglons.

Alerté par la vision de ce minuscule insecte rampant, collé à la muraille et qui s'approchait de leur charnier natal, le couple d'aigles royaux avait quitté le nid pour surveiller l'intrus. Au fur et à mesure que l'alpiniste s'approchait du gîte, les parents s'alarmaient. Ils montaient alors haut, très haut dans la lumière, pour fondre sur l'étranger. Ce dernier protégeait son avance par une espèce de parapluie métallique, dont les reflets, allumés par le soleil, repoussaient les assauts ailés.

L'homme émergea enfin prés d'un amas de branches et brindilles, jonché de plumes. C'était là que se blottissaient trois oiseaux splendides qui, petits par la taille, défendirent leur territoire avec la bravoure des grands. L'intrus n'eut qu'à jeter une espèce de filet sur l'un d'eux pour le neutraliser. Il entreprit alors de descendre vers les Humains, muni de sa triste conquête.

Longtemps, les parents affolés tentèrent tout ce qui fut possible pour jeter dans les abysses le sinistre criminel. Las... Tard dans la nuit, il y eut un long conciliabule qui meurtrit de douleur toute la famille des aigles alentour.

Rentré à son domicile, l'homme plaça un lien à la patte de l'oiseau qu'il enferma dans une cage métallique, à l'intérieur d'un hangar qu'une faible lumière éclairait. Sa fille, adolescente, vint découvrir la merveilleuse créature, repliée derrière ses barreaux, l'œil fixe et la force tranquille.

L'aiglon fit d'abord la grève de la faim et de la soif. Mais son corps s'affaiblissait. Alors, en cachette, il buvait puis mangeait. L'homme sut qu'il avait gagné. Rendre dépendant pour mieux enchaîner, il connaissait...

L'aiglon devint aigle, un jour. Mais personne ne s'en aperçut, sauf la jeune fille qui, elle aussi, était devenue femme. Elle avait deviné la transformation biologique, avec son intuition féminine, après avoir inauguré une communication subtile avec l'animal meurtri. En cachette, elle condamnait l'incarcération de l'oiseau mais n'osait pas affronter le père dont les colères étaient terribles. Sa mère s'était tue, depuis longtemps déjà... L'esclave ne peut que se taire.

L'aigle avait accepté de manger dans la main de la jeune femme, mais jamais dans celle de l'homme. En un souverain mépris, il lui opposait un regard sombre où brillait le souvenir de la poussière du soleil qui inondait les cimes lointaines de son enfance, de pourpre et d'or.

Le temps passait. Un jour, l'homme fit un héritage et, par vanité grossière, il fit construire une cage somptueuse. Les barreaux étaient en métal doré. Il aimait montrer l'animal à ses convives, à l'issue d'agapes bien arrosées. Ce fut à l'occasion de l'une d'elles qu'un fiancé fut envisagé pour la jeune fille.

Le prétendant était un jeune homme fortuné, diplômé des hautes écoles, bien de sa personne et qui promettait. La jeune femme accueillit la cour qu'il lui fit tambour battant, avec amusement. Un jour, elle l'emmena vers l'aigle pour observer le comportement de son fiancé.

- "C'est un oiseau splendide!" Constata-t-il.

- "Oui, n'est-ce pas".

Puis il essaya de l'embrasser, mais elle se déroba.

- "Je ne vous comprends pas. Qu'arrive-t-il ? Vous ne m'aimez pas...! Alors quoi..." Interrogea l'homme.

- "L'aigle, regardez-le."

- "Mais je l'ai vu. C'est un aigle, c'est tout. Il serait bien dans une volière plus grande. Mais c'est nous deux qui comptons... Quand nous marions-nous ?"

-"....."

- "Ecoutez. J'ai une maison, du terrain et j'hériterai l'usine de mon père. Nous aurons des enfants. Nous irons en vacances, partout où nous voudrons. On sera heureux, très heureux... Embrassez-moi."

Le fiancé s'approcha de la jeune femme qui se déroba de nouveau. Elle s'était approchée de la cage d'où l'aigle la regardait, avec une lueur qu'elle seule comprenait. Elle approcha sa main et tendit ses doigts à l'intérieur des barreaux.

L'homme tira sur son bras, alarmé.

- "Mais faites attention, cet animal peut être dangereux. Il risque de vous couper un doigt en deux. Embrassez-moi...!"

La jeune femme s'écarta et le regarda bien en face, avec des yeux semblables à ceux de l'aigle des cimes. Une lumière de colère s'y alluma et, d'une voix coupante, elle trancha :

- "Vous ne savez que demander de vous embrasser. Vous ne parlez que de vous, de ce que vous allez faire quand nous serons mariés. Vous décidez de tout. Vous voulez me mettre en cage comme cet aigle que vous n'avez même pas regardé".

- "Calmez-vous..."

- "Vous me décevez. Vous êtes comme tous les autres. Vous cherchez à emprisonner ceux que vous aimez. Dans une cage dorée ou pas, ce n'est pas le métal qui fait la cage. Des barreaux en or sont comme des barreaux de fer. Votre argent vous permet de tout acheter, votre usine aussi. Vous n'avez qu'à paraître pour que tout le monde s'incline devant vous, votre argent, vos diplômes. Mais pour qui vous prenez-vous ? Je ne suis pas à acheter."

-"......"

- "Cet aigle est enchaîné mais il est libre intérieurement. Alors que vous, avec votre supériorité d'homme, vous êtes enchaîné par tous vos "avoir". Vous n'êtes pas. Vous n'êtes rien. Donc vous ne pouvez rien m'apporter qui me soit utile. Je ne serai pas votre servante sous le prétexte que vous êtes beau, intelligent, fortuné. Votre cage, je n'en veux pas. Je ne veux aucune cage..., jamais!"

- "Je vous aime car vous êtes comme je l'imaginais, farouche et indomptable. Vous êtes comme un joyau que je saurai sertir dans l'écrin qui lui convient. Jamais je ne vous abandonnerai, jamais...!"

- "Présomptueux que vous êtes, Monsieur. Un écrin n'est qu'une prison et votre amour pour moi n'est qu'une cage à votre mesure. Vous avez manqué votre dernière chance tout à l'heure. Si vous m'aviez répondu de manière pure, honnête et intransigeante à l'égard de l'essentiel que symbolise la liberté indispensable pour cet oiseau, comme pour tout être, j'aurais compris que vous saviez que l'Amour révèle l'autre à lui-même. Pour une vie de braise: celle de la Vérité.

-"Mais ....."

"Vous n'avez eu aucun sentiment de compassion pour l'aigle; vous l'avez à peine regardé. Il n'y a donc que vous au monde ? Les animaux, les gens et les choses sont-ils, pour vous Monsieur, des objets de consommation ?"

-"Attendez ....."

L'homme, le regard étincelant de colère et ivre d'orgueil meurtri, était pétrifié.

La jeune femme, hiératique, s'approcha de la cage où l'aigle gisait, blotti dans sa dignité et sa douleur. Elle ouvrit la porte, lentement, et avança sa main vers le splendide oiseau. Elle le caressa, doucement, avec une tendresse infinie. Il lui tendit son cou, à la recherche d'une tendresse compatissante. Elle fourragea ses plumes, d'une main émue.

Alors de ses doigts malhabiles elle réalisa le projet, qu'elle concevait depuis quelque temps déjà, en entreprenant de dénouer la chaîne qui liait l'aigle à un barreau de sa prison. Puis, l'oiseau enfin libéré, elle plaça sa main sous une de ses terribles serres qu'il couvrit sans haine, aucune. La seconde serre vint se placer sur la main tremblante.

La jeune femme sortit l'aigle de sa cage et le porta au dehors du hangar, dans le jardin inondé de poudre solaire. L'oiseau tourna la tête vers le soleil qu'il regarda, face à face, noble et droit. Il parla à l'astre de feu qui lui répondit...

L'aigle redressa le cou, ébouriffa ses plumes et dénoua ses ailes. Il tourna un regard profond comme la nuit, lourd comme la lave de feu, tendre comme une mère, fort et puissant comme le ciel, à l'assaut de la jeune femme, libre de la liberté toute nue, la seule vraie...!

Que se dirent-ils ? L'un parla, du langage muet des étoiles qui enseignent de toute éternité, et l'autre reçut. L'une fut initiée par l'autre libéré...!

Il y eut deux êtres libérés.

L'aigle déploya ses ailes immenses, voiles de l'espoir infini, et prit son envol. Grandiose est l'instant où l'Être se déploie, gravit les cimes de l'existence cosmique pour rejoindre son destin.

Il n'y eut plus qu'un point dans le ciel et l'aigle avait rencontré son futur. La jeune femme plongeait un regard perdu dans l'immensité des étoiles qui en comptaient une de plus, désormais. Puis elle revint à une réalité plus terrestre. L'homme était toujours là...!

Il était comme différent, soudainement. Habité par un doute nouveau, il paraissait bizarrement plus humain, car plus vulnérable et mûr. Mais elle ne l'aimait pas pour autant. Il ne suffit pas de souffrir pour Être... Aussi, décida-t-elle de l'enseigner, à son tour, puis de partir.

- "Monsieur, l'aigle m'a dit avant de me quitter que rien n'a plus de prix, dans la vie, que la Liberté d'ÊTRE. Tout le reste n'est que billevesée, turlutaine et vanité. Si vous Êtes, alors vous Aimez."

-"....."

- "Soyez...!"

La jeune femme partit, d'un pas léger et majestueux, vers un pays sans nom et sans chemin dont elle avait, seule, le secret.

Une nuit, alors que les étoiles inondaient la terre d'une vie renouvelée, l'homme découvrit une étoile filante. Il lui sembla voir un aigle qui ressemblait étrangement à une femme.

Dès cet instant, l'homme comprit que nul ne pouvait emprisonner une étoile.

Alors il fut...!

mercredi 18 janvier 2012

Les vrais mystères de la pensée indoue à la lumière d'Occident (Introduction à la Bhagawat Geeta - 3° volet)

RETOUR À L’ORIENT

"Dieu n'a aucun droit; il n'a que des devoirs. L'Homme et le Vivant n'ont aucun devoir envers lui; ils n'ont que des droits".

Sentence du Porteur de lumière

Cette brève excursion en dehors de notre civilisation contemporaine nous ramène à l’épopée hindoue qu’elle éclaire quelque peu.

Après leur exil, les PANDUS réclamèrent de leur oncle scélérat l'octroi d'une terre de résidence puisque, par leur nature même, les guerriers ne pouvaient être autre chose que des protecteurs ou suzerains. Les PANDUS auraient accepté un simple village. Mais, par un souverain mépris, leur oncle rejeta les doléances.

Le symbolisme s’accélère. Les nouvelles capacités cognitives du corps humain organisent un nouveau Champ sensoriel de l’existence. Il y a comme un accroissement du potentiel ontologique

Relégués à la misère et à l'errance, les PANDUS furent obligés de se battre contre DURYODHANA; ARJUNA commença une guerre apocalyptique, en compagnie de ses frères. Le conflit rassembla les plus grands guerriers de la terre entière, dont les uns voulaient mettre YUDHISTHIRA, aîné des PANDUS, sur le trône, et les autres l'en empêcher.

Ici, la vigilance la plus aiguë doit présider à l’analyse de cette symbolique :

a) Les cinq sens plus les douze centres neurologiques (les PANDUS) travaillent à travers la forge de la Réalité matérielle afin de l’appréhender, malgré leurs limites et limitations, et pour croître ontologiquement.

b) La Connaissance, signée par le cakra AJNA (ARJUNA), débute une guerre apocalyptique qui, sur le plan ontologique pur, correspond à la Réalisation du SOI telle que JEAN l’apocalypse l’enseigne.

c) Le plus grand des PANDUS (de tous les Centres énergétiques de la Conscience individuelle) – c’est à dire le SOI occupe le trône (la Cathédrale de l’âme – le Royaume)

d) La Guerre Apocalyptique n’est, en réalité, que la mutation de l’humanité vers la Supra Conscience. S’il y a une fin, ce n’est pas celle « du » monde mais d’ « un » monde, qui ne sera jamais autre que transitoire, éternellement.

KRISHNA (Le SOI) participe à la bataille des contraires, sans combattre en Personne. Les PANDUS sont les outils du DHARMA de KRISHNA. Les KURUS désignent les « eaux mères » au sein desquelles surgit le cristal de la Conscience du SOI. L’antagonisme « ADHARMA-DHARMA » est le reflet d’un duo cosmique, d’une danse énergétique. Cependant, il peut se transformer en guerre et en combat si les contradictions se cristallisent au lieu de dépasser leur moment historique d’existence. L’évolution en spirale gomme les différences.

KRISHNA (le SOI) est le conducteur du Char (le corps) d'ARJUNA qui en est devenu « conscient ». Ainsi commença la sombre désespérance de ce guerrier qui ne put se résoudre à combattre ses semblables. KRISHNA lui fit comprendre que les conflits imitaient toujours les plans spirituels supérieurs.

Les PANDUS obéissent aux nécessités du DHARMA, et dépendent de la nature divine de KRISHNA (le SOI). les KURUS sont dans l'ADHARMA tant que les outils cognitifs ne sont pas organisés. Sur le plan moral, l’identification à l’Ego transitoire est considéré comme une stagnation d’ordre ADHARMIQUE.

Si nous retenons la correspondance des évènements symboliques, ci-dessus, avec l’Histoire de l’Inde et de personnages ayant réellement existé, alors nous pourrions retenir qu’une véritable guerre se déroula de par le passé. Les hostilités durèrent dix huit jours seulement, mais elles entraînèrent la mort de 640 millions d'êtres humains.

Sur le plan cosmique, il s'agit de la représentation symbolique du jeu des énergies en action, dans et à travers les univers, de l'infiniment grand à l'infiniment petit. Les divers protagonistes et antagonistes, présents dans le conflit entre les contraires, désignent des facteurs et lois physiques qui préludèrent à l'origine de notre monde et s'y perpétuent jusqu'à leur aboutissement cyclique. C'est cette correspondance entre l'histoire humaine, et son homologue cosmique, intraduisible autrement que par la symbolique en regard du niveau intellectuel de l'époque, et dont les clefs ne nous ont pas été transmises, de nos jours, par les Sages indiens, qui fait encore défaut.

L'histoire de notre monde, résumée de manière symbolique par la Genèse, commença lorsque le Vide naquit. Certes, le paradoxe de la poule qui vient de l'œuf, mais alors d'où vient l'œuf, ne nous éclaire pas pour autant. Aussi, essayons de comprendre l'autre message, celui de la lumière combattant les ténèbres, la dualité principe qui s’éclairera à travers trois volets :

1) Le plan causal personnifié par KRISHNA.

2) Le plan astral et karmique, inhérent aux effets découlant des actes matériels. La morale et les morales.

3) Le plan physique de l’action, symbolisé par ARJUNA, en sa vocation d’Éveil et de Réalisation du SOI.

La nécessité de la Réalisation du SOI, pour la Création à l’infini, telle que l’hindouisme l’énonce avec fermeté, exige pour être comprise que l’on disserte, encore et encore, du DHARMA quelque peu. A cet effet, faisons une nouvelle incursion vers la bible des hébreux en comprenant bien ceci :

« La doctrine hindoue énonce que le SOI est aussi bien présent dans RIEN, que dans les TÉNÈBRES et la LUMIERE ; et à l’infini de la Création tout entière ! »

L’affirmation du Prologue : « Le Logos divin, le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous », prélude au septénaire « descendant » mais annonce, aussi, la Réalité de ce que l’hindouisme nomme le DHARMA et qui ne peut s’exprimer que par la symbolique :

« La nécessité ontologique de Réaliser l’Écho éternel et exponentiel de la Lumière au SOI qui l’émane. Entre les deux, il existe des plans déjà abordés ».

Afin d’expliciter les analogies nous ajouterons, aux échelons du septénaire, les correspondances hindoues, relatives à l’Homme ; que tout un chacun se fasse une opinion fondée !

a) Le jour premier, archétype du rythme de la création et qui porte en lui-même sa plénitude, la lumière est nommée, séparée des ténèbres. L’hindouisme l’appelle : SAHASRAR (le sommet du crâne – au-dessus encore et c’est le SOI, dans le Vide).

Dans la kabbale hébraïque, cette séparation s’égrène à travers une sémantique spécifique qu’il est opportun de reproduire en y ajoutant, cette fois-ci, une idée qui lui est étrangère, culturellement, mais omniprésente par vocation :

Le SOI (BRAHMARANDRA au niveau physiologique, occulte).

AÏN qui signifie le Vide.

AÏN SOPH qui désigne les ténèbres (la première nuit)

AÏN SOPH AUR qui précise la lumière (le premier jour).

b) Le second jour de la Genèse voit l’appel de l’étendue et la séparation des eaux d’en haut et d’en bas. Paul NOTHOMB remarque qu’il s’agit de la seule étape de la création qui ne comporte pas le sceau de l’approbation divine : “Dieu vit que cela était bon” ; comme si elle restait alors inachevée ou imparfaite. Plus tard, avec l’Apocalypse, ce genre de question ne se posera plus en son essence car la notion de plénitude s’avèrera. Cependant, pas comme l’expliquent les exégètes contemporains et ce sera, pour la plupart, une découverte. L’indouisme l’appelle : AJNA (le 3° œil).

c) Au troisième jour, le sec émerge de l’univers fluide, puis adviennent la verdure et les arbres, la vie végétale. Il englobe deux étapes de la création, scellées par “Dieu vit que cela était bon”, la première venant achever l’œuvre du second jour. L’hindouisme l’appelle : VISHUDDH (l’Ether – la gorge).

d) Le quatrième jour, Dieu nomme les astres et les temps et leur confie la fonction de séparer, comme au premier, lumière et ténèbres. Il y a là comme une maturité de la création, un gain de discernement. L’hindouisme l’appelle : ANAHAT (l’Air – le cœur).

e) Le cinquième jour de la Genèse marque l’apparition de la vie animale, dans les eaux et dans les airs. Pour la première fois, depuis le début du Poème, la parole de Dieu ne suffit pas. Dès qu’il a dit “Que les eaux grouillent d’êtres vivants...”, il les bara, leur accorde donc un degré de liberté supplémentaire. Puis il ne sépare pas, mais les bénit. L’individuation, la tension vers la personne, s’exprime sur un autre mode qui respecte la nouvelle autonomie de l’univers. L’hindouisme l’appelle : MANIPUR (le Feu – l’ombilic).

f) Le sixième jour, comme le troisième, comporte deux étapes : l’appel des animaux terrestres et la création de l’homme. Après la parole qui nomme : “faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance”, a lieu un triple bara : “Dieu bara l’homme à son image - il le bara à l’image de Dieu - homme et femme il les bara”. L’image trinitaire en l’homme est une liberté tri-unique. Vient alors la bénédiction et, pour la première fois, Dieu parle à sa créature comme un père à l’enfant. L’hindouisme l’appelle : SVADHISTAN (l’Eau – le sexe).

g) Le septième jour, l’œuvre de Dieu est achevée et il entre dans son repos. Mais il le bénit et le sanctifie. L’hindouisme l’appelle : MULADHAR (la Terre – le coccyx).

L’alternance du jour avec la nuit induit la notion de dualité principe (les deux piliers de la tradition – ida et pingala, jakin et boaz, yin et yang, le sympathique et le para sympathique, etc.) Les jours, au nombre de sept, désignent aussi, au sein de la culture indienne et dans le tantrisme spirituel, les sept chakras (roues) qui sont des centres d’énergie dans le corps humain et répartis dans la colonne vertébrale. L’énergie primordiale « descend », un par un, le long de la corde spinale, les dits chakras jusqu’au dernier qui correspond à l’élément « terre », la matière moule de l’énergie et forge de la conscience. A ce stade, Dieu se repose symboliquement ; cette allégorie traduit le fait que l’énergie primordiale, étant complètement matérialisée dans le corps humain, s’y arrête. Nous verrons, plus loin, comment cette même énergie se réveillera pour accomplir une autre création : l’Apocalypse, en prenant pour nom nouveau : Kundalini ! Et à travers un autre septénaire, « ascendant » !

Entre les deux étapes du septénaire, chutant et du septénaire remontant, il y a le DHARMA – la Réalisation du SOI. L’Apocalypse de JEAN n’énonce rien d’autre que l’avènement de la Conscience qui inonde de sa Présence énergétique (Kundalini - Shakti) les sept cakras de la Connaissance et de l’Amour. Si nous devions symboliser la bible à travers une géométrie, nous utiliserions la lettre H :

a) Le premier jambage, vertical, est la chute originelle comportant sept étapes inorganiques.

b) Le deuxième jambage, horizontal, désigne l’apparition de l’organique et de l’Instinct (le récit Moïsiaque) ; puis de l’Amour (le récit Christique) L’homme n’est pas encore responsable mais victime ; de sa propre ignorance et de celle des autres.

c) Le troisième jambage, vertical, précise l’accomplissement par la Connaissance (le récit apocalyptique de Jean – sept autres jours ou étapes vers le supra humain). L’homme est Conscient de sa Divinité ; devenu responsable il est donc immortel.

Déjà, et pour préluder au Grand Secret que divulgue la BHAGAWAT-GEETA, nous relèverons d’autres éléments fondamentaux dans le récit de la Genèse et tels que la tradition hindoue nous enseigne sur leur sens universel :

« L’Arbre de Vie dans le jardin d’Eden ».

Il s’agit de la Colonne vertébrale avec ses sept cakras (le septénaire morphologique) au milieu du Champ illusoire du Corps humain, terrestre, (qui peut être un Chant aussi !), siège du système sensoriel et sensuel : la Maya – la Grande Illusion.

« L’Arbre de la connaissance du Bien et du Mal ».

Nous avons les deux courants duels, que constituent le sympathique et le para sympathique longeant la Corde spinale. L’alternance de la dualité engendre le Courant de la Vie et l’apprentissage à la Responsabilité de la Conscience qui s’Éveille. Par contradictions…

« Un fleuve arrose le Jardin d’Eden et porte quatre têtes ».

Cette rivière délimite la zone de combat inhérent à l’existence ; le symbolisme des têtes est clair : les quatre éléments en constituent les matériaux. Elle définit, aussi, le cours sacré de la vie spirituelle incarnée par le SOI. Elle a un homonyme avec le GANGE dont le rôle symbolique est identique.

« L’interdiction de manger le fruit de l’arbre de la Connaissance du Bien et du Mal ».

Sous peine de mort, l’homme est condamné à cette interdiction. Le symbolisme est clair : la dualité de l’existence est consécutive de morts et renaissances successives (aux vérités, au moi passionnel, etc. – le mythe du Phœnix).

« Jéhovah constate que l’homme est devenu comme l’un des siens en connaissant le bien et le mal. Il appréhende qu’il prenne du fruit de l’arbre de vie et, en conséquence implacable, qu’il devienne immortel » - Genèse (III – 22).

L’hindouisme est clair à ce même sujet : DIEU n’est pas étranger à la création. Le dualisme de la Vie amène, après que le septénaire a réalisé son potentiel ontologique (l’Apocalypse en traduit le processus en sept autres étapes verticales, ascendantes), l’Immortalité de la Conscience. Cet enseignement n’aboutit pas à la notion de « fin » de la Vie, ou d’un « dessein » cosmique. S’il y a achèvement suggéré, il n’y a pas de limite néanmoins. Tout cela s’éclairera le long du présent texte.

L’âme s’élabore et se construit à travers une Philosophie de la Science et une Science de la Philosophie. Autrement dit, sans la Science expérimentale, l’esprit humain n’évolue point. L’existence repose sur la découverte des lois de notre environnement et l’Église eut tort d’interdire la recherche fondamentale, sous le prétexte fallacieux que, autrefois et dans l’antiquité la plus reculée, un mauvais usage en fut fait. Par cette attitude, la Religion commit les mêmes erreurs et drames du passé. Il est pathologique de privilégier un pan de la Connaissance, au détriment de l’autre ; il est impossible de créer une pièce de monnaie sans double face !

Le chant épique de la Genèse biblique est comme une symphonie du Monde que l’Inde traduisit à l’aide d’une symbolique qui n’aboutit jamais à une dogmatique. Cette musique céleste, que chantèrent tous les anciens Rishis de l’Inde antique, constitua le début de la BHAGAWAT-GEETA que nous allons découvrir ensemble, sous la bannière de KRISHNA la "personne bleue de la Conscience ".

dimanche 15 janvier 2012

Les vrais mystères de la pensée indoue à la lumière d'Occident (Introduction à la Bhagawat Geeta - 2° volet)

LES MYSTÈRES APOCALYPTIQUES



Selon l’Indouisme, Kundalini est l’Energie évolutrice dans l’homme. C’est elle qui actualise les 10/10° du cerveau endormi et achève la Conscience en une Réalisation totale qui inaugure le supra humain. D’origine sanscrite, le vocable Kundalini signifie l’enroulée, l’énergie cosmique qui siège au bas de la colonne vertébrale, dans le coccyx. Connue sous un nombre quasi infini de noms, Elle est Shakti, la Mère qui accouche l’Homme à l’Etre. Contrairement à l’idée reçue, Elle n’est pas étrangère à la tradition judéo-chrétienne. Si nous nous reportons à l’Apocalypse, nous avons les sept cakras de la tradition indienne, sous des noms différents – les sept Eglises de l’Apocalypse de JEAN, et que Kundalini active après les avoir traversés.

CAKRAS INDOUS - EGLISES DE L’APOCALYPSE - GLOSE APOCALYPTIQUE

a) Sahasrar.

Eglise de Laodicée Versets 14 et 21, chap. 8 : Voici ce que dit l’Amen, le témoin fidèle et véridique, le principe de la création de Dieu.
Le vainqueur, je le ferai asseoir avec moi sur mon trône, ainsi que j’ai été vainqueur, moi aussi, et que je me suis assis avec mon Père sur son trône.

b) Ajn.

Eglise de Philadelphie Verset 12, chap. 7 : Le vainqueur, j’en ferai une colonne dans le temple de Dieu et il n’en sortira jamais plus.

c) Vishuddh.

Eglise de Sardes Verset 5, chap. 6 : Je n’effacerai pas son nom du Livre de Vie.

d) Anahat.

Eglise de Thyatire Verset 28, chap. 5 : Je lui donnerai aussi l’étoile du matin.

e) Manipur.

Eglise de Pergame Verset 17, chap. 4 : Au vainqueur je donnerai de la manne cachée.

f) Svaddhistan.

Eglise de Smyrne Verset 8, chap. 3 : Celui qui a connu la mort et a repris vie.

g) Muladhar.

Eglise d’Ephèse Verset 7, chap. 2 : L’Esprit dit aux 7 Eglises ! Au vainqueur je donnerai à manger le fruit de l’arbre de vie, qui est dans le paradis de Dieu.

En occident, une erreur grammaticale consiste à ajouter la voyelle « a » à la fin de chaque cakra, cette dernière signifie le pluriel en sanscrit.

Etudions chacun des versets à la lumière kundalinienne.

1) L’Eglise d’Ephèse symbolise l’Eveil de l’Energie évolutrice, à travers le cakra de base. L’Arbre de vie désigne la colonne vertébrale dont le fruit s’avère l’ouverture naturelle du cakra coronal, le Sahasrar de couleur violette qui débouche, enfin et au prix d’une multitude d’incarnations, sur le Paradis de Dieu, c’est à dire le Brahmarandra situé au-dessus du crâne, à l’Infini.

Le verset parle de victoire ! Ce qui signifie que la Conscience a vaincu l’illusion de l’Ignorance, par la Connaissance et l’Amour.

2) L'Eglise de Smyrne est l’image de la victoire de la Conscience sur la mort ! Il s’agit du mythe du Phénix qui renaît de ses cendres. L’Homme achevé et réalisé a conscience de son immortalité.

3) L’Eglise de Pergame correspond à l’énergie secrète, vitale, que le souffle accumule dans le « Hara » (centre énergétique situé à quatre doigts au-dessous du nombril).

4) L’Eglise de Thyatire est le symbole de l’Amour Universel – qui est la plus grande Force de l’Univers. L’Etoile du matin signe la vision flamboyante dans le 3° œil, d’une image à cinq branches, de couleur blanche, virulente.

5) L’Eglise de Sardes désigne la Voix cosmique, le Verbe originel. L’homme réintégré au sein de la Conscience universelle est devenu le Vivant, conscient et responsable.

6) L’Eglise de Philadelphie correspond au 3° œil. Le Sage réalisé devient, consciemment, le Partenaire de la Création universelle.

7) L’Eglise de Laodicée symbolise la sortie de l’Energie kundalinienne du sommet du crâne pour se confondre avec son homologue cosmique. Le verset est lourd de sens. Là encore il est fait mention d’un « vainqueur ». La clef du mystère réside dans l’affirmation : « Ainsi que j’ai été vainqueur, moi aussi, etc. ». La Personne Réalisée, qui parle et enseigne les Eglises apocalyptiques, révèle le Secret de la Vie. Elle-même est issue de la création, a été un humain, dernier maillon de la chaîne des êtres vivants sur la terre, et après s’être libérée de l’Ignorance et de la mort, par l’avènement de l’Energie kundalinienne, est devenue semblable à la Conscience Divine. Tous les kundaliniens sont les héros de l’Evolution en réalisant le SOI (la Vacuité consciencialisée).

Ces éléments sont essentiels ; ils éclaireront un mythe fantastique qui s’est propagé depuis des siècles, en occident : la Queste du Graal. En Indes, il s’agit de la quête spirituelle de la Réalisation du Soi dont la BHAGAWAT GEETA est la synthèse symbolique.

Il n’y a pas de réelle redondance dans la BHAGAWAT-GEETA mais, par nécessité pédagogique, reformulation multiple de vérités afin de couvrir le maximum d’interprétations. Autrement dit, et si nous voulions prendre une métaphore, nous pourrions énoncer :

- Pour le Vulgum Pecus, les traditions dites « religieuses, mystiques, ésotériques » sont sacrées. Sous cette épithète, on veut enchaîner à une vision du monde, subjective et collective, orienter l’âme en la contraignant. Ainsi, l’Ignorance se perpétue.

- Si l’on veut déconditionner le monde, en lui restituant sa Liberté intérieure d’accès à la Vérité existentielle, il convient de bannir l’idée du sacré – fausse vérité - au profit de la Réalité intérieure, accessible malgré tous les conditionnements culturels, fussent-ils spirituels.

- Il convient d’être Conscient du SOI dans tous les actes de la Vie ; simplement mais totalement.

DHRTARASTRA n'accepta jamais d'avoir été supplanté par son frère cadet et, par goût de revanche, il éleva ses enfants dans l'esprit de vengeance contre les cousins. PANDU mourut, prématurément, et son frère aîné prit en charge ses neveux. L'aveugle attenta à la vie de ses neveux et de leur mère. Toutefois, l'oncle des PANDUS, VIDURA, permit de déjouer les complots.

Ne s'estimant pas vaincu, DURYODHANA prit la relève de son père DHRTARASTRA en provoquant au combat les cinq fils de PANDU qui, en leur qualité de ksatriyas (guerriers chevaliers, équivalents des samouraïs serviteurs) ne pouvaient pas refuser un défi. DURYODHANA ne respecta pas les règles du jeu et tricha; il réussit à frustrer les PANDUS de leur territoire et les exila pour une douzaine d'années.

Le territoire des PANDUS est le champ illusoire des sens limités comme organes de perception des éléments existentiels. Leur exil pendant douze ans, par DURYODHANA, peut correspondre à l’avènement des douze cakras cérébraux, postérieurs à l’instauration des cinq sens. Autrement dit, l’évolution du système cérébro spinal aboutit à l’apparition de douze cakras supplémentaires dont nous étudierons l’édifice, plus loin. A ce stade de la symbolique hindoue, le dualisme devient duo ; ou trio :

I) DHRTARASTRA – la Matrice, la Nuit de la potentialité infinie - fournit tous les agrégats possibles pour servir de véhicules à la Conscience – le SOI.

II) DURYODHANA – la Matière reçoit les outils sensoriels que va activer le SOI. D’abord, il y a les 5 sens.

III) Les PANDUS (les cinq sens) sont augmentés de douze autres éléments cognitifs , dans le cerveau humain. C’est DURYODHANA qui les concrétise, au pouvoir des PANDUS qui s’en trouvent renforcés.

A ce niveau de l’histoire, où s’entremêlent des personnages ayant réellement vécu et une symbolique cosmique, la difficulté est grande de démêler l’écheveau. Il y aurait comme une distance à prendre à l’égard de l’expérience sensorielle qui ne traduit pas la Réalité. L’illusion des sens est réelle, multiple ! Par exemple nous souffrons d’aberrations visuelles comme avec les mirages dans les déserts, et nous ne percevons pas toutes les vibrations sonores et visuelles, pour ne retenir que celles-ci ! La Matière-Energie (symbolisée maintenant par DURYODHANA) est confrontée aux cinq sens de la Vie pour la Conscience du SOI plus douze centres énergétiques dans le cerveau. Il y aurait, d’un côté, la force de l’inertie sensuelle inhérente à la matière et, de l’autre, le catalyseur des changements que constitue le moteur du SOI. Leur interaction se manifeste par une lutte des contraires que le matérialisme dialectique, contemporain, résume ainsi :

a) L'homme ne serait que de la matière pensante, intelligence comprise; matière pensante parvenue à son stade le plus pur, le plus noble, le plus évolué et, ainsi que l'écrivit Maurice PERCHE dans les "Cahiers du communisme" - commentant Georges POLITZER - parvenue à son dernier stade du saut qualitatif brusque.

b) La matière est considérée comme étant en plein mouvement par l'affrontement de deux forces; elle est et elle n'est pas à la fois, elle est en état de devenir. La dialectique matérialiste repose sur quatre lois:

- Loi d'auto dynamisme qui est le moteur interne de la matière.

- Loi d'action réciproque ou d'interdépendance.

- Loi de contradiction interne.

- Loi du saut qualitatif brusque.

1°) Loi d'auto dynamisme.

Toute chose change sous l'influence de forces internes qui la poussent à se métamorphoser. Cette loi constitue le moteur interne de la matière. Appliquée à l'ensemble de l'univers, elle entraîne l'athéisme en ne reconnaissant pas de cause extérieure à la matière.

2°) Loi d'action réciproque.

Tout influe sur tout. Il ne s'agit pas de cause à effet mais seulement d'interdépendance. Cette loi complète la précédente.

3°) Loi de contradiction.

Les choses changent car elles ont en elles-mêmes une contradiction. Une anti-thèse existe en toute chose, contredisant sans cesse la thèse. Au terme de leur lutte apparaît soudain un troisième état supérieur à la thèse, c'est la synthèse.

4°) Loi du saut qualitatif brusque.

Les changements se réalisent comme des déchirements violents. La lutte interne des contraires provoque d'abord des changements quantitatifs superficiels jusqu'au moment où, l'équilibre étant rompu, il y a changement qualitatif brusque.

Puis le mouvement recommence. C'est un processus en spirale dans lequel on progresse. La matière ne peut que monter.

Les choses changent car il existe une antithèse contredisant sans cesse la thèse, et préparant une troisième étape qualitative, supérieure. La synthèse est donc un progrès. Par conséquent, il y a une thèse, une antithèse, un moment dialectique et une synthèse. Puis, il y aurait un autre processus reposant sur la transformation de la synthèse en une thèse nouvelle soumise à contradiction, etc.

L’image du serpent montant le long d’un arbre est éclairante en rhétorique. Sa tête glisse et tourne à 360° pour réapparaître au-dessus. De par ses changements de direction, il a monté. Le processus de la Vie Universelle est analogue.

Toute chose est en mouvement et ce dernier est la cause même du progrès. S’il ne devait y avoir qu’une seule disposition immuable dans le monde, ce serait le changement. L'application de cette loi au cosmos et à la société entraîne les événements suivants :

a) Au début il y eut une nébuleuse, de la matière en fusion lancée dans l'espace. Au terme d'un certain nombre de sauts qualitatifs brusques, au moment où toutes les conditions ambiantes et chimiques furent réunies, la matière se mit à penser.

b) Ce ne fut pas encore l'intelligence, la pensée organisée, nous confie ENGELS. Il faudra attendre une nouvelle rupture entre deux contradictions, une nouvelle synthèse, pour qu'un primate atteigne la pensée organisée et déductive. Puis, à un moment donné, cette intelligence répartie prendra la forme d'une société primitive.

c) Cette société était semblable à la nôtre mais se différenciait de celle-ci par le savoir et la science. Elle était écrasée par les éléments ambiants, par les forces aveugles de la nature: tremblements de terre, éruptions volcaniques, animaux terrifiants, climats rudes. Une nature rebelle et hostile écrasait l'être humain. Privé du secours de la science, il éprouvait ce que Georges POLITZER appela une sensation, un complexe combiné d'action. Ce quelque chose que l'homme de l'époque ne pouvait analyser, FEUERBACH l'explique comme étant le "reflet fantastique de la réalité". L'homme primitif éprouva une sensation collective; il eut peur. Cette crainte, au lieu de la comprendre et de l'assimiler dans une optique objective, il en fit une réalité pesante et lui donna un nom: DIEU.

A partir du moment où la peur fut identifiée à Dieu, des esprits plus évolués que les autres soumirent une partie de l'humanité aux caprices d'une autre. Ce fut l'exploitation de l'homme par l'homme, par l'ignorance. Nous pouvons constater la reproduction du mécanisme de l’Univers, reposant sur l’Ignorance originelle, d’après la logique indienne, jusque dans les relations intra ou extra spécifiques à l’intérieur des espèces vivantes.

Cette trilogie funeste: « peur », « Dieu » (d’après le matérialisme dialectique, Dieu n’est pas le SOI mais l’Ignorance – alors que pour l’hindouisme le SOI est Dieu) « exploitation » introduisit dans la matière intelligente ce qui existait dans la matière non pensante: la loi de contradiction interne. Il y eut désormais:

La thèse: les exploiteurs.

L'antithèse: les exploités.

La synthèse: l'évolution qualitativement supérieure.

La lutte entre la thèse et l'antithèse, la loi de contradiction introduite dans la matière intelligente qu'est la société, ces deux là prirent le nom de "lutte des classes". A son terme viennent le moment dialectique qui se nomme "dictature mondiale du prolétariat", d'une part, et la synthèse attendue avec impatience, la "société sans classe", d'autre part.

La lutte de classe est considérée comme le moteur de l'histoire:

- Le féodalisme contre l'esclavage.

- Le capitalisme contre le féodalisme.

- Le socialisme contre le capitalisme.

- Le communisme contre le socialisme.

Et cœtera...

Karl MARX affirmait que le fait religieux fut à la racine de tous les maux de la terre, dont l'exploitation de l'homme par l'homme.

Ajoutons l’idée du SOI, à la place du Dieu des hommes que rejette avec raison le matérialisme dialectique, et nous aurons alors un récit, sur la création et la vie, plus proche de la tradition hindoue que de n’importe quelle autre idéologie religieuse ou athée. A cet égard une brève incursion, chez nos philosophes contemporains, s’impose.

PENDANT CE TEMPS, L’OCCIDENT ?

Des esprits particulièrement éclairés, chacun en son temps, ont jalonné le parcours de la pensée de repères qui servent encore aujourd'hui. Ainsi Adolphe HARNACQ déclara, un jour, au cours d'une séance qui réunissait, dans la salle de conférence de l'Université de Berlin, à la fois des philosophes et des physiciens:

"Le monde se plaint du fait que notre génération n'a plus de philosophes. C'est très injuste car les philosophes d'aujourd'hui se trouvent tout simplement dans un autre compartiment; leurs noms sont PLANCK et EINSTEIN."

Gageons qu'une telle assertion ne plut à personne! Les philosophes en titre ont dû se sentir dépouillés et les physiciens se virent imposer une épithète qui n'emportait pas leur adhésion, sinon de principe. Les scientifiques ont toujours eu une méfiance certaine pour la philosophie; en effet, pour la plupart, la métaphysique par exemple n'est qu'une dialectique purement spéculative, méritant à coup sûr le rejet. La démarche philosophique fut en antagonisme avec la méthode scientifique jusqu’à ce que l’on découvre le Vide Quantique.

Certes, un DESCARTES avait doctement énoncé:

"Ainsi, toute la philosophie est comme un arbre dont les racines sont la métaphysique, le tronc est la physique et les branches qui sortent de ce tronc sont toutes les autres sciences".

Mais DESCARTES rejoignait la lignée des PYTHAGORE, COPERNIC et GALILEE qui furent des chercheurs universels, alors que les scientifiques d'aujourd'hui sont restés trop longtemps spécialisés dans un domaine précis. Ainsi, un astrophysicien n'aura pas la même analyse qu'un biologiste, bien qu'à un certain niveau de recherche les limites éclatent.

Certains prémisses ont annoncé, depuis quelques décennies, le retour de l'idée de Connaissance liée à la science. Autrement dit, la science pourrait bien apporter un accroît de Conscience, en concomitance.

Pour mieux cerner cette résurgence nous allons essayer de la situer dans son contexte historique, autant que l'on puisse tirer des leçons de l'histoire.

A) L'école d'ARISTOTE.

Son nom est lié à la "Philosophie naturelle" qui fut une science mariée à la métaphysique; elle régna pendant 2.000 ans.

D'origine grecque, ARISTOTE naquit à Stagire (Macédoine) en 384; il mourut à Chalcis (Eubée) en 322. Il fut le fondateur de l'Ecole péripatéticienne qui, comme son nom l'indique, se voulait en "marche" - du grec "péripatein", se promener - car ARISTOTE enseignait en marchant. Effectivement, la marche stimule la pensée, sous certains abords, car le corps rejoint l'esprit dans l'effort. Napoléon procédait de même, avant les grandes batailles qu'il livra, et il marchait de longues heures, de long en large, dans son appartement, de nuit comme de jour, et les mains croisées derrière le dos.

Le système d'ARISTOTE nous montre la nature dans un immense effort de la matière brute pour s'élever jusqu'à l'Acte pur, c'est à dire à la pensée et à l'intelligence. Il fut l'auteur de traités de logique, de politique, d'histoire naturelle et de physique. On lui doit de magnifiques ouvrages: "Histoire des animaux", "Rhétorique", "Politique" et "Météorologie". Au moyen âge, il fut la référence élue des philosophes scolastiques.

Cette science prévalut surtout qualitativement mais, bien que logique en ses postulats, elle péchait par défaut de rigueur mathématique. Le raisonnement s'appuyait trop sur des "à priori" dogmatiques que, trop souvent, rien ne venait étayer expérimentalement.

Aussi des prémisses, annonciateurs d'une remise en cause des dogmes aristotéliciens, apparurent dés le XVII° siècle avec COPERNIC en Pologne, GALILEE en Italie et DESCARTES en France, qui les jugèrent inadmissibles puisque invérifiables. Ces esprits, courageux pour l'époque, remirent nettement en cause la notion d'un univers anthropocentriste, chère à ARISTOTE.

B) DESCARTES.

Philosophe, mathématicien et physicien il naquit à La Haye (Touraine) en 1596 et mourut à Stockholm en 1650, après avoir répondu à l'invitation de la reine Christine. Il fut militaire, un temps, ce qui lui permit de parcourir l'Europe et, à l'occasion, de se faire "initier" au sein d'une Loge Rosicrucienne (Rose + Croix). On lui doit la création de la géométrie analytique et la découverte des principes de l'optique géométrique. Il raisonnait en "matérialiste" mais apparut comme un "idéaliste" aux yeux de ses contemporains.

Ses raisonnements rigoureux ruinèrent la scolastique et aboutirent à une méthode nouvelle de diriger la raison. Cette technique, connue plus tard sous le nom de "cartésianisme", se résume en un commentaire:

"Pour atteindre à la vérité, il faut une fois dans sa vie se défaire de toutes les opinions que l'on a reçues et reconstruire de nouveau, et dés le fondement, tous les systèmes de ses connaissances".

Il intégra dans la recherche scientifique, la technique mathématique aux prémisses rigoureux. Son "Discours de la méthode" définit les limites à attribuer à la métaphysique, et à l'empirisme. Toutefois, DESCARTES continua de chercher des principes en son propre esprit car il jugea toute méthode basée essentiellement sur les sens, et sur l'expérience seule, comme imparfaite. Ecoutons-le:

"Tout ce que j'ai reçu jusqu'à présent pour le plus vrai et assuré, je l'ai appris des sens ou par les sens; or, j'ai quelques fois éprouvé que ces sens étaient trompeurs, et il est de la prudence de ne se fier jamais entièrement à ceux qui nous ont une fois trompés. C'est une chose qui m'est manifeste à présent, que les corps mêmes ne sont pas connus par les sens..., mais par le seul entendement, et qu'ils ne sont pas connus de ce qu'ils sont vus ou touchés, mais seulement de ce qu'ils sont entendus ou bien compris par la pensée."

DESCARTES entrevit le principe de la conservation de l'énergie. On retiendra surtout qu'il conserva le lien entre la science et la philosophie; peut-être faut-il y voir l'influence rosicrucienne!

C) NEWTON.

Illustre mathématicien, physicien, astronome et philosophe anglais, il naquit à Woolsthorp (Lincolnshire) en 1643 et mourut en 1727. On lui doit la découverte de la gravitation universelle et de la décomposition de la lumière (spectre solaire). En même temps que LEIBNIZ, il découvrit les bases du calcul différentiel.

Comme DESCARTES, il fréquenta des loges rosicruciennes. A l'occasion, il travailla l'alchimie comme l'attestent des annotations manuscrites, de sa propre main, sur un traité alchimique conservé aux archives nationales, anglaises. Mais la ressemblance s'arrête là!

D'emblée, avec NEWTON nous connaissons la rupture chirurgicale entre la science et la philosophie. Pour lui, le "pourquoi" des phénomène importe peu et, seuls, les résultats expérimentaux sont à prendre en compte. Ecoutons FONTANELLE, alors secrétaire perpétuel de l'académie des sciences, à son sujet:

"Les deux grands hommes (DESCARTES et NEWTON), qui se trouvent dans une si grande opposition, ont eu de grands rapports. Tous deux ont été des génies de premier ordre, nés pour dominer sur les autres esprits et pour fonder des empires. Tous deux, géomètres excellents, ont vu la nécessité de transposer la géométrie dans la physique. Tous deux ont fondé leur physique sur une géométrie qu'ils ne tenaient presque que de leurs propres lumières. Mais l'un, prenant un vol hardi, a voulu se placer à la source de tout, se rendre maître des premiers principes par quelques idées claires et fondamentales, pour n'avoir plus qu'à descendre aux phénomènes de la nature comme à des conséquences nécessaires. L'autre, plus timide ou modeste, a commencé sa démarche en s'appuyant sur les phénomènes pour remonter aux principes inconnus, résolu de les admettre tels que les pût donner l'enchaînement des conséquences. L'un part de ce qu'il entend nettement pour trouver la cause, l'autre de ce qu'il voit".

Ainsi, la métaphysique et la philosophie furent délaissées, pendant prés de 200 ans, au profit de l'empirisme. Les philosophes, eux-mêmes, abandonnèrent la philosophie, trouvant son voisinage compromettant.

Un courant scientiste s'inaugura donc, pour s'amplifier avec VOLTAIRE, Auguste COMTE et Karl MARX (à qui l'on doit la théorie dite « marxiste ») qui ironisèrent sur la métaphysique. Aussi l'étape historique de l'évolution de la science moderne, celle du dénombrement, de la classification et de l'analyse quantitative, au lieu d'être dépassée, stagna à ce stade pendant longtemps, c'est à dire jusqu'à EINSTEIN.

La méthode consistant à séparer l'objet pensé du penseur ne saurait être définitive car tout choix de système de référence n'est que relatif et, par là même, susceptible de révisions évolutives, dans le temps. Le probabilisme de l'observable bat en brèche tout dogme, même scientifique. Ainsi, nous avons l'exemple du concept de l'atome insécable qui prévalut dans les collèges jusque dans les années 1950; ce qui n'empêcha pas les lois chimiques de s'exercer telles qu'elles avaient été édictées. La découverte du nucléaire lança la technologie physico-chimique sur des bases nouvelles et transcendantes, bouleversant ainsi toutes les données, révolues, de l'insécabilité de l'atome...

Les découvertes nouvelles remettent en cause les précédents acquis. La recherche fondamentale est infinie et s'élargit à l'image de la base d'un triangle qui croît indéfiniment, sans que jamais le sommet de la connaissance ne soit atteint.

Tout ceci fut pressenti et prouvé par EINSTEIN qui rétablit l'union entre la matière et l'esprit.

D) EINSTEIN.

Physicien d'origine allemande, EINSTEIN naquit en 1879 à Ulm et mourut en 1955. Prix Nobel en 1921, il fut surtout connu pour ses travaux sur la théorie de la relativité qui marqua profondément la science moderne. La célèbre formule sur l'énergie: E = MC2 permit l'élaboration de la bombe thermonucléaire. Il fut l'auteur de nombreux travaux de physique théorique. Appliquant la théorie des quantas à l'énergie rayonnante, il aboutit au concept de photons. Epris de justice, il intervint souvent en faveur d'une paix durable.

Avec EINSTEIN nous connaissons comme le retour d'une certaine métaphysique dans la démarche scientifique. L'espace et le temps sont des concepts plutôt que des réalités concrètes. Que sont l'espace et le temps ? Peut-on les séparer? A moins qu'ils soient les deux pôles d'une seule et même réalité, comme l'aimant dont on ne peut jamais séparer les deux pôles. Si on essaye, on obtient toujours deux pôles...; pas moyen d'obtenir un pôle positif seul, ni le négatif.

On lui doit d'avoir réhabilité l'idée de DESCARTES, au sujet des planètes entraînées par des tourbillons, et celle des esprits animaux, en découvrant que les astres suivaient des lignes de courant appelées géodésiques de l'espace-temps. Y aurait-il un psychisme existant au stade des particules élémentaires?

DESCARTES aurait eu donc le mérite d'avoir devancé son époque de plus de trois siècles. Il avait réussi à définir une frontière entre l'inspiration subjective, voire métaphysique, et la méthode objective de l'expérimentation. L'osmose de ces deux disciplines a pu mener aux sommets de la connaissance et à une image unitaire des univers.